Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/486

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Champenoux, qui fut le centre de la bataille, et à Cresic, qui est presque entièrement détruit. Le maire de cette dernière commune et ceux des habitants qui y sont rentrés nous expliquent que les Allemands ont incendié les maisons sans motif et de parti pris, en commençant par celle du général Lyautey. « Et ces barbares, nous dit le maire, c’étaient des gamins, messieurs, des gamins ! » Et il paraît encore plus furieux contre leur âge que contre leur sauvagerie.

Nous poussons ensuite vers le nord, jusqu’à proximité de la frontière. Nous quittons les autos, près de l’étang de Brin et nous nous avançons à pied, à travers la forêt, jusqu’à la lisière. À la demande du général Dubail, je remets la médaille militaire à un brave sergent de réserve, qui s’appelle Lavedan et qui est instituteur dans les Hautes-Pyrénées. Il a été blessé au bras droit, il y a huit jours, et après s’être fait panser, il a spontanément repris le commandement de sa section6. À l’orée du bois, nous nous trouvons aux avant-postes. Les soldats, qui sont des réservistes et des territoriaux, ont établi sous les arbres des tranchées et des abris souterrains. À Brin, il y a un peloton d’avant-garde et, de l’autre côté de la Seille, dans les villages que nous voyons là, ce sont les Allemands. Aujourd’hui, tout est au calme. On ne se bat pas dans ce secteur. On se borne à se surveiller du regard.

Nous rentrons à Nancy et nous en repartons immédiatement pour Lunéville. Ici, la foule, assez nombreuse dans les rues, nous reconnaît et se précipite