Page:Ponchon - La Muse au cabaret, 1920.djvu/80

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Avais-je toute ma raison ?…
Je ne sais plus… mais sa façon
Me parut infiniment louche,
Malgré qu’il n’eût pas l’air mauvais,
Car, chaque fois que je buvais,
Il portait mon verre à sa bouche.

D’abord, j’en concluais ceci :
C’est quelqu’un qui n’est pas d’ici,
D’un savoir-vivre contestable,
En voudrait-il à mes argents ?…
Quand on ne connaît pas les gens,
On ne se met pas à leur table.

Comme je ne suis pas bavard,
Et qu’il se taisait, pour sa part,
Nous étions là comme deux brutes ;
Finalement, vous pensez bien,
Je payai mon verre et le sien,
Afin d’éviter les disputes.

Puis, sur-le-champ, je le quittai,
Et m’en allai boire à côté,
Espérant ainsi m’en défaire…
Eh bien, pas du tout. De nouveau,
Je dus trinquer avec ce veau,
Qui me ressemblait comme un frère.