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Nos fragiles esquifs, avec leurs blanches voiles,
Se promènent, le soir, aux clartés des étoiles,
Comme des cygnes gracieux !

Tu n’as pas, vaste mer, pour orner tes rivages,
Ces arbres vigoureux, ces élégants rideaux
De verdure et de fleurs, qui, penchés sur les eaux,
Y versent leurs parfums et les couvrent d’ombrage
Mais les mâles rochers que frappe ton courroux,
Dessinant sur ton sein leurs longues silhouettes,
Au coucher du soleil semblent courber leurs têtes,
Comme des moines à genoux.

Lorsque je parcourais le plus heureux des âges,
Et qu’un instinct d’amour m’entraînait, chaque soir,
Sur tes bords bien-aimés où je venais m’asseoir,
J’admirais ton azur, tes grandioses plages :
Et maintenant encor, en quittant mon travail,
Je viens faire, parfois, au milieu de tes lames,
De mon corps un esquif, de mes deux bras des rames,
Et de mes pieds un gouvernail.

Qu’on est fier de dompter les filles des tempêtes,
Ces vagues au front blanc, que l’on voit s’affaisser,
Se creuser en abîme, en monts se redresser,
De la base des rocs s’élancer sur leurs têtes,