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Et lorsque le vaisseau, dans la brume du soir,
Franchit de l’horizon la profondeur austère,
Moi, captif, je m’assieds sur le roc solitaire,
Et mon cœur lui crie : au revoir !

Combien la mer est belle à l’heure où le silence,
Fidèle ami des nuits, se pose sur son sein !
Qu’on se plaît à la voir, lorsque, dans le lointain,
L’esquif de deux amants sur les flots se balance !
Ou que, sur ses filets, sous le chaume tressés,
Quelque pauvre pêcheur dans sa nacelle veille,
Pieds nus, le bonnet rouge incliné sur l’oreille,
Et les pantalons retroussés !

Mais quand on voit les flots, pendant une nuit sombre,
Lancés contre les rocs comme des javelots ;
Lorsqu’on entend au loin les cris des matelots
Proclamer le péril du navire qui sombre
Et d’un bateau sauveur implorer le secours ;
Quand le canon d’alarme envoie un dernier râle,
Et que son cri de mort, perdu dans la rafale,
Ne trouve au bord que des cœurs sourds ;

Alors le spectateur, s’éloignant de la rive,
Semble dire à la mer : Adieu, gouffre inhumain !
Il fuit épouvanté. Puis si le lendemain
Il revient sur les bords où la vague n’arrive