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Page:Potvin - Sous le signe du quartz, 1940.djvu/229

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œil, dardant ses reflets sur les petites vagues du lac qui s’argente ?… Est-ce bien là une portion de cette toundra hétéroclite de rochers et de schistes, de soulèvements de sable asphaltique, rugueuse enveloppe de ces trésors souterrains qui feront, un jour, de cette partie inférieure du Bouclier canadien l’Eldorado du Canada ?…

À pareil moment, lorsqu’on est assis l’un en face de l’autre, et qu’on se regarde sans parler, le visage familier nous parait comme lointain. Il semble qu’on se voit sous un jour inconnu, en dehors du temps. Mais on finit quand même par vouloir parler, savoir, apprendre quelque chose de nouveau…

Et je sais que le père Lasnier, lui, ne peut rester longtemps sans parler, Auguste Renault et moi le connaissons comme une encyclopédie ambulante, cet homme qui a couru tout le continent américain, et qui a étudié à fond chaque coin de terre qu’il a foulé. Il sait citer des faits, des dates : il aime à émailler son parler d’anecdotes sérieuses ou plaisantes, Et, comme je rêve toujours :

« Je sais ce que vous pensez », me dit, soudain, le père Lasnier, dont la voix résonna, étrange, dans ce calme du soir…

— Ah !

— C’est à cette terre qui nous entoure. Jusqu’à il y a quelques années, vous l’avez connue