Page:Procès-verbal de la Commission Municipale du Vieux Paris, 1899, 5.djvu/15

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intentionnelles aux silex que celles qu’elle a consacrées, M. Thieullen considère les silex de Chelles et de Saint-Acheul — de même que les pierres polies — comme des produits d’une industrie relativement perfectionnée, n’ayant peut-être pas d’utilité pratique, et remplissant le rôle d’objets de luxe, d’apparat ou de superstition. Il établit à cet égard la différence qui existe actuellement entre la vulgaire fourchette de fer qui sert à tous les usages et qui se trouve partout, avec les ustensiles d’orfèvrerie créés pour le luxe.

L’ouvrage contient 21 planches reproduisant en regard un certain nombre de silex des époques paléolithique et néolithique avec désignation des endroits où ils ont été trouvés. La ressemblance est frappante. La dernière planche contient toute une série de types recueillis à Vaugirard dans une même fouille, rue Miollis, par MM. Thieullen et Leroy.

Le travail de M. Thieullen est des plus attachants : le labeur considérable qu’il représente, ainsi que la conviction sincère et profondément réfléchie qui s’en dégage, en rendent la lecture attrayante et passionnante ; il témoigne la plus grande vénération pour l’oeuvre de Bouclier de Perthes et c’est par une citation que je terminerai :

Nous ne sommes plus, dit M. Thieullen, à l’époque où Boucher de Perthes s’efforçait de découvrir des pierres taillées de formes de plus en plus parfaites dans la nécessité où il était d’avoir raison du scepticisme tenace des savants les plus autorisés.

C’est qu’alors, il faut le dire, ce caillou, enseveli depuis un nombre incalculable de siècles, s’il était reconnu taillé, allait mettre à néant les antiques légendes des peuples sur les origines de l’homme et faire, à lui seul, œuvre autrement lumineuse que celle accomplie par les philosophes de tous les temps et de tous les pays.

Paris, le 4 mai 1899,

L. Tesson. »

21. — Rapport présenté par M. André Laugier relatif à l’examen, sur place, de débris d’architecture ayant appartenus à l’abbaye de Saint-Germaindes-Prés.

J’ai l’honneur de rendre compte à la Commission d’une excursion récente faite rue de l’Abbaye, et dans les rues avoisinantes, par les membres de la Ire Sous-commission et

quelques autres de nos collègues : MM. Bunel, Normand, Gosselin-Lenôtre, Selmersheim, Mareuse, Le Vayer, Laugier, Augé de Lassus, Sellier, Lambeau et Tesson, à la suite d’une communication faite, à la précédente séance, sur d’intéressants débris d’architecture ayant appartenu à l’abbaye de Saint-Germain des-Prés.

Au n° 6 de la rue de l’Abbaye, nous avons vu au fond de la cour plusieurs chapiteaux et colonnettes. rangés symétriquement de chaque côté d’une fontaine ; d’autres fragments de sculpture, meneaux, gargouilles, etc., se trouvaient également réunis dans cette cour. Mais la Sous-commission a examiné avec une attention particulière trois arceaux du XIIIe siècle, encastrés dans le mur d’une salle obscure voisine de la loge du concierge, paraissant être les restes, demeurés sur place — non d’un des cloîtres de Saint-Germain-des-Prés, comme le prétendait Lefeuve, — mais de la célèbre chapelle de la Vierge, œuvre de Pierre de Montereau. Ces arceaux ont été reconnus comme étant du même style et de la morne époque que les débris de chapiteaux et de colonnettes placés dans la cour voisine, et les membres de la Sous-commission ont été d’avis qu’une photographie fut faite de ces restes si intéressants de l’art français.

A l’angle de la même rue et de la rue de Furstemberg, dans une cour voisine, plantée d’arbres et ornée de charmilles, communiquant avec la première, se trouvent plusieurs arceaux complets avec leurs colonnettes, groupés sur le perron donnant entrée dans la maison.

D’autres fragments d’architecture également dignes d’intérêt, parmi lesquels une très belle balustrade gothique, se trouvent dans la même cour, près d’un berceau de verdure, adossés à l’un des angles du mur de la propriété. Cette maison est habitée par un vicaire de l’église Saint-Germain-des-Prés, qui nous a donné l’assurance que toutes facilités seraient données à la Commission pour prendre des photographies des colonnettes et des arceaux provenant, comme les précédents, de la chapelle de la Vierge.

Je crois devoir ajouter que, la maison n° 6 de la rue de l’Abbaye ayant dû être démolie il y a environ deux ans et pouvant l’être plus ou moins prochainement, il y aurait lieu de songer à assurer à la ville de Paris la possession des précieux monuments qu’elle renferme (1).

(1) Il est à noter qu’un reste, du plus grand intérêt, de l’ancienne chapelle de Pierre de Montereau (une partie du portail) se trouve au dépôt des chantiers de Saint-Denis.