Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/265

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l’autorité prendra votre défense : voilà tout. — Pardon, monsieur le maire ; la loi, en France, protége tout le monde, même les coupables qu’elle réprime. Le gendarme n’a pas le droit de frapper l’assassin qu’il empoigne, hors le cas de légitime défense. Si un homme est mis en prison, le directeur ne peut s’approprier ses effets. Le passe-port, ainsi que le livret, car je suis muni de l’un et de l’autre, implique pour l’ouvrier quelque chose de plus, ou il ne signifie rien. — Monsieur, je vais vous faire délivrer 15 centimes par lieue pour retourner dans votre pays. C’est tout ce que je puis faire pour vous. Mes attributions ne s’étendent pas plus loin. — Ceci, monsieur le maire, est de l’aumône, et je n’en veux pas. Puis, quand je serai au pays, où je viens d’apprendre qu’il n’y a rien à faire, j’irai trouver le maire de ma commune comme je viens aujourd’hui vous trouver ; en sorte que mon retour aura coûté 18 fr. à l’État, sans utilité pour personne. — Monsieur, cela ne rentre pas dans mes attributions…. Il ne sortait pas de là.

Repoussé avec perte sur le terrain de la légalité, je voulus essayer d’une autre corde. Peut-être, me dis-je, l’homme vaut-il mieux que le fonctionnaire : air placide, figure chrétienne, moins la mortification ; mais les mieux nourris sont encore les meilleurs. — Monsieur, repris-je, puisque vos attributions ne vous permettent pas de faire droit à ma requête, donnez-moi un conseil. Je puis au besoin me rendre utile ailleurs que dans une imprimerie, et je ne répugne à rien. Vous connaissez la localité : qu’y a-t-il à faire ? que me conseillez-vous ? — Monsieur, de vous retirer.

Je toisai le personnage. Le sang du vieux Tournési me montait au cerveau. — C’est bien, monsieur le maire, lui dis-je les dents serrées : je vous promets de me souvenir