Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/198

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avis, par l’excès même de leur délicatesse : voilà tout. Pourquoi, aujourd’hui que vous avez tant besoin d’indulgence, prêtres et évêques, n’agissez-vous pas de même ? Vais-je m’enquérir si vous avez ou non des concubines et des bâtards ? Entre honnêtes gens, on se tait sur ces misères, qui ne touchent pas au fond des choses et n’accusent que l’ignorance où la société est encore, sur cette question des sexes, du droit et du devoir. Rappelez-vous ce que répondait Marc-Antoine à Octave, son collègue, qui lui reprochait ses farces avec Cléopâtre : Quid te mutavit ? quod reginam ineo ? Uxor mea est. Nunc cœpi, an ab hinc annos novem ? Tu deinde solam Drusillam inis ? Ita valeas, uti tu hanc epistolam cùm leges, non inieris Tertullam, aut Terentillam, aut Ruffillam, aut Salviam Citisceniam, aut omnes ? Anne refert ubi et in quam arrigas ?… Voilà, Monseigneur, si j’étais tel qu’on a voulu le faire entendre, ce que j’aurais le droit de dire à bon nombre d’entre vous, et que je ne me permettrai pas même de vous traduire.

Attachons-nous donc à la question : je n’ai eu d’autre but, en m’exécutant de bonne grâce, que d’y arriver plus vite.

Or, la question, puisque vous prétendez tirer une induction contre la philosophie de l’incontinence dans laquelle peuvent tomber les philosophes, bien qu’ils n’y tombent pas tous, bien que ceux qui tombent soient en général dans leurs chutes, les plus réservés des hommes ; la question, dis-je, est de savoir si cette incontinence, telle quelle, qui leur est reprochée et qui leur est commune avec tant de prêtres, provient de l’esprit philosophique ou de l’esprit de religion ; si par conséquent le christianisme, bien qu’il prêche le mariage, et en dehors du mariage la continence, est à l’abri de tout reproche ; si ses maximes officielles répondent à la dignité de la civi-