Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 2, Garnier, 1850.djvu/355

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mariage et la famille, ce que nous ayons observé dans le travail, la concurrence, le crédit et la propriété : nous verrons l’amour se changer en une excitation spasmodique et nerveuse ; la promiscuité intriguée succéder à la fidélité conjugale, comme l’agio à l’échange ; la société se corrompant par les femmes, comme elle s’est corrompue par le monopole ; le corps politique tombant à la fin en pourriture : ce serait fait de l’humanité.


II.

Le problème subsiste donc en entier : à nous maintenant de tenter une nouvelle recherche.

Il est démontré que l’humanité tend à s’accroître, en population, selon une progression géométrique 1. 2. 4. 8. 16. 32. 64… indéfinie.

Il est prouvé d’autre part que le développement de cette même humanité, en capital et en richesse, suit une progression plus rapide encore, dont chaque terme peut être considéré comme le carré du nombre correspondant de la première, 1. 4. 16. 64. 256. 1024. 4096 à l’infini.

Ces deux progressions, parallèles et solidaires, enchaînées l’une à l’autre d’un lien indissoluble, se servant réciproquement de cause et d’effet, et qui du reste servent à énoncer une tendance bien plus qu’elles n’expriment une vérité rigoureuse, sont assujéties, dans chacun de leurs termes, à la même période de temps.

Ce premier point constaté, reste à savoir comment cette tendance de l’humanité à s’accroître, tant en population qu’en produit, se limite elle-même, puisqu’il est géométriquement impossible que l’accroissement se soutienne avec la même intensité pendant toute la durée du monde, alors qu’il pourrait suffire de deux ou trois siècles pour encombrer d’hommes et de produits la surface entière du globe. Or, si Dieu nous a commandé de croître et multiplier, et de remplir la terre, il ne nous a pas dit de dépasser les bornes : la teneur du précepte l’indique toute seule.

Quelle est donc la limite naturelle de l’accroissement de l’humanité, en population et en richesse ?

Observons d’abord que la période dans laquelle s’accomplit le doublement de la population et le quadruplement correspondant de la richesse est essentiellement variable, et que sous l’action de diverses causes, dont nous n’avons point