Page:Quevedo - Don Pablo de Segovie.djvu/187

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je lui dépeignis une livrée. Après quoi, je me plaçai entre eux et nous marchâmes.

Chemin faisant, je considérais qu’il n’était pas possible qu’aucun de ceux qui nous voyaient décidât et jugeât à qui étaient les pages et les laquais que nous avions à notre suite et quel était celui de nous trois qui n’en avait point. Je commençai à parler fort haut du carrousel de Talavera et d’un cheval porcelaine que je possédais. Je leur en vantai beaucoup un, que je comptais qu’on m’amènerait de Cordoue. En rencontrant quelque page, quelque cheval ou quelque laquais, je faisais arrêter et je demandais à qui il appartenait. À l’égard du cheval, j’en parlais en connaisseur, et je m’informais s’il était à vendre. Je lui faisais faire deux tours dans la rue, je lui trouvais un défaut à la bouche, quoiqu’il n’en eût point et j’enseignais le remède. Le hasard voulut qu’il s’offrit plusieurs occasions de cette espèce. Comme les deux autres cavaliers paraissaient étonnés et qu’il me semblait leur entendre dire en eux-mêmes : « Quel est ce pauvre gentilhomme qui fait ainsi l’écuyer ? » parce que l’un avait sur la poitrine une croix de chevalier, l’autre une chaîne de diamants, qui était en même temps la marque d’un ordre et d’une commanderie, je dis que nous devions, un de mes cousins et moi, nous trouver à des fêtes et que je cherchais de bons chevaux pour nous deux.

Nous arrivâmes au Cours et en y entrant je tirai le pied de l’étrier, je mis le talon en dehors et je