Page:Quevedo - Don Pablo de Segovie.djvu/223

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quand elle sut mon nouvel état. Elle me répondit en ces termes :


Je vous remercie moins de vos heureux succès que je n’en attends des actions de grâces, et je ne m’en réjouirais même pas, si je ne savais que ma volonté et vos avantages sont tout un. Nous pouvons dire que vous avez fait un retour sur vous-même, et il ne vous reste plus à présent que d’avoir une persévérance proportionnée à celle que vous promettez. Je doute qu’il y ait aujourd’hui parloir ; mais ne manquez pas de venir à Vêpres. Nous nous verrons là et ensuite au travers de la grille. Peut-être aussi pourrai-je tromper l’abbesse. Adieu.


Cette réponse me contenta fort, parce que la religieuse avait réellement de l’esprit et qu’elle était belle. Je dînai, et après avoir endossé l’habit avec lequel je jouais les rôles d’amant à la comédie, j’allai à l’église. Je fis ma prière et je commençai ensuite à repasser avec les yeux tous les trous de la grille, pour voir si la religieuse ne paraissait pas. J’étais dans cette occupation lorsque j’eus le plaisir d’entendre l’ancien signal. Mais le diable vint à la traverse. Je me mis à tousser, et il s’éleva dans le chœur une toux si générale que nous ressemblions à des gens qui avaient des catarrhes. L’on eût dit que l’on avait jeté du poivre dans l’église. Enfin j’étais las de tousser, quand une vieille parut à la grille en toussant aussi. Je reconnus alors combien un pareil