Page:Quevedo - Don Pablo de Segovie.djvu/224

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

signal est dangereux dans les couvents, parce que si c’est un signal de la part des jeunes, c’est habitude de la part des vieilles, et un homme qui a cru entendre le chant d’un rossignol, ne découvre en réalité qu’un chat-huant.

Je restai longtemps dans l’église a attendre que l’on commençât les vêpres. Je les entendis tout du long, comme font tous les galants des nonnes, d’où vient qu’on les appelle amoureux solennels et qu’ils ont aussi le renom de ne jamais sortir de la veille du consentement, parce qu’ils n’en voient jamais arriver le jour. On aura peine à croire combien de paires de vêpres j’ai entendues. À force de m’allonger pour voir, j’avais deux aunes de cou de plus que quand je m’étais embarqué dans cette intrigue galante. Je me liai étroitement avec le sacristain et l’enfant de chœur et je me fis bien venir du vicaire, qui était un homme plein d’humeur, si raide qu’on ne savait comment le prendre, en un mot, un vrai fagot d’épines.

J’allai me montrer sous les fenêtres du couvent et quoique que ce fût dans un endroit très vaste, il fallait y envoyer prendre place dès midi, comme à la comédie pour une nouvelle pièce. Il y avait une grande affluence de dévots et je me plaçai où je pus. On pouvait y aller voir comme des choses rares les différentes postures des amants. Celui-ci regardait fixement, sans clignoter les yeux ; celui-là, ayant une main sur son épée et tenant de l’autre un rosaire, était comme une figure de pierre sur un tombeau. Un autre, avec les mains levées et les bras étendus,