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SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

sentiment d’embarras que ne pouvait dissiper aucune marque de condescendance de la part des grands personnages. Cet arrangement malheureux obligeait toutes les personnes présentes à avoir présent à la pensée le rang élevé des personnes qui pouvaient imposer de telles combinaisons. Et ce rang nous était aussi rappelé sous un de ses aspects les moins heureux, car il avait pour effet d’isoler une jeune femme en son plein épanouissement dans le chœur des compagnes de son âge et de faire autour d’elle la solitude au milieu d’une foule que formait l’élite de la jeunesse, de la bravoure, de la beauté et de la distinction.

En somme, eu égard à mes modestes prétentions, j’eus lieu d’être reconnaissant : on me témoigna toute la bonté, toute l’attention possible. Je sentais que j’étais entièrement redevable de mon invitation à mon noble ami. Mais comme j’avais été invité, je m’aperçus d’après ce qui se passait qu’il avait été entendu et convenu que je ne serais en aucune façon, négligé, abandonné à moi-même.

Lord W — et moi, nous échangions à l’occasion nos idées au moyen d’un langage qui nous rendit d’assez grands services à cette époque et qui se nommait Ziph. Le nom et la chose tiraient également leur origine de Winchester. Le docteur Mapleton, médecin de Bath, qui m’avait donné ses soins de concert avec M. Grant pendant la maladie indéfinie dont j’avais été atteint à la tête, avait trois fils en classe à Winchester, et le motif qui le décida à les en retirer vaut la peine d’être rapporté, en ce qu’il aide à comprendre le système bien connu des brimades. Un ou deux d’entre eux laissa apercevoir au coup d’œil rapide et médical du docteur Mapleton les symptômes d’une santé