Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/332

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rents et ils appartiennent, nous a-t-on dit, à une confrérie de pieuses gens qui, en dehors de leurs talents spéciaux, exercent des métiers honorables. Bien que faisant partie d’une association religieuse, ils ne dédaignent pas de tirer profit de leurs cérémonies. Ils avaient apporté avec eux les accessoires nécessaires et ils se sont accroupis autour d’un brasero dans lequel l’un d’eux a jeté des grains d’encens, tandis qu’un autre frappait sur une sorte de tambour. Ensuite, ils ont commencé à faire des incantations bizarres, en psalmodiant une espèce de chant rauque et nasillard. Quand ces litanies et ces fumigations eurent duré un certain temps, ils ont ouvert une boîte de carton qui contenait des scorpions, et l’un des gaillards a offert sa lèvre inférieure aux pinces de la bête venimeuse. L’homme, d’ailleurs, ne semblait ressentir aucune douleur, pas plus que son camarade qui se larda les bras de longues aiguilles, à la grande joie de l’équipage rassemblé sur le pont et faisant cercle autour de nous pour jouir de ce beau spectacle.

Cependant, nos dévots préparaient une expérience plus sérieuse. Le sujet était un grand diable brun et barbu. Lorsqu’il eut enlevé sa chéchia, son crâne, rasé de près, apparut et, dans ce crâne, l’un de ses compagnons se mit à enfoncer à coups de marteau un gros et long clou. Cette fois, le jeu n’était pas seulement répugnant, il était horrible. L’homme au marteau frappait vigoureusement. Des filets de sang commençaient à couler sur le visage et dans la barbe du patient, qui paraissait insen-