Page:Régnier - La Canne de jaspe, 1897.djvu/104

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sans les instances du vieillard qui le retenait auprès de lui. Le vieux moine se délassait dans la compagnie de cette ouaille si dissemblable du troupeau que sa crosse de bois conduisait dans les sentiers monotones de la règle.

Un jour, vers cinq heures de l’après-midi, M. d’Amercœur, sorti par le vieux porche, marchait parmi les hautes herbes de l’avenue. L’instant était mélancolique et grandiose, les arbres barraient de leurs ombres l’allée funéraire, des lézards couraient sur la pierre tiède des tombeaux antiques, se glissaient par leurs fissures. D’une main, M. d’Amercœur retroussait sa longue robe de moine, de l’autre il tenait la clef pour ouvrir la serrure en cœur du jardin médicinal où il aimait à se promener. Il le voulait revoir encore une fois avant de partir, encore entendre la semelle de ses sandales crier sur le gravier des allées, sentir son froc frôler les bordures de buis. La symétrie des parterres lui plaisait : leurs carrés contenaient des plantes délicates et des fleurs curieuses ; des petits bassins en nourrissaient d’aquatiques. Elles plongeaient dans l’eau leurs racines et s’épanouissaient en se mirant. Aux intersections