Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/369

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— « Ah ! Giorgio, ce diable d’Angiolino, il n’y a que lui, il n’y a que lui ! »

Une nouvelle poussée de rire l’interrompit, puis il reprit enfin, assez distinctement et plus clairement qu’on eût pu en attendre du début :

— « Ah ! cet Angiolino, où a-t-il mis la main sur une pareille merveille ? »

Il s’arrêta encore, toussa. Il se fit sur sa figure comme une éclaircie. Maintenant, il ravalait sa salive au lieu de la laisser couler, et ses yeux exprimaient une malice singulière. C’était une de ces échappées intermittentes qui parfois lui rendaient un espace de demi-raison et d’où il retombait ensuite, et promptement, en sa décrépitude habituelle. Il continua.

— « C’est déjà Angiolino qui m’a procuré Palizzio, pense donc, un singe pour représenter ce Palizzio maudit qui vota pour Onorelli ; un singe assez laid pour représenter Palizzio, cet imbécile de Palizzio ! Tiens, regarde-le ! le vois-tu qui se querelle avec Francavilla ? »

Palizzio était un assez vilain macaque, crasseux et ordurier en sa robe rouge. Il se tenait en face de Francavilla, les mains mauvaises et grinçant des dents. Francavilla, lui, était une sorte de babouin, piteux et couard. Sa longue queue dépassait sa robe. Soudain, Palizzio se précipita sur cette queue. Les deux bêtes roulèrent l’une sur l’autre avec des cris de rage, en une bousculade furieuse. Palizzio se dégagea assez vite et, tandis que Francavilla s’enfuyait en geignant, il resta maître du terrain, assis sur son derrière, en sa laideur encore batailleuse, mais satisfaite.