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LA DOUBLE MAÎTRESSE

escapades où sa galante compagne avait aventuré son honneur à toutes mains.

Quand le carrosse des Galandot avait visité toutes les gentilhommières dont les maîtres valaient la peine qu’on s’y arrêtât, il se dirigeait vers la ville. Les Galandot y fréquentaient peu et seulement l’indispensable, bien qu’ils y possédassent un hôtel où, du reste, ils ne séjournaient jamais et dont les volets et le portail restaient clos tout le long de l’année.

On ne les voyait guère qu’à cinq ou six portes et à celle de l’évêché.

C’était une fort belle maison de pierre. L’évêque y résidait peu, mais le diocèse l’estimait pour sa bonne tournure épiscopale, ses rochets de fine dentelle et la renommée qu’il s’était acquise ailleurs, autant par ses talents réels pour la chaire que par ses hautes vues de politique ecclésiastique, et Mme de Galandot ne manquait pas, chaque année, de poser à l’anneau pastoral le baiser de ses belles lèvres froides.

Elle ne les desserrait guère par contre chez les Berville. M. de Berville portait sabots et patoisait, et ce n’était pas non plus sans quelque peine qu’elle consentait à descendre un instant chez les du Fresnay.

Ces bonnes gens, apparentés de fort loin aux Mausseuil, possédaient au Fresnay une agréable demeure. Dès l’entrée, on y respirait une odeur de pâtisserie cuite et d’essences distillées. Mme du Fresnay excellait à confire des fruits et à composer des friandises de sa façon. Elle apparaissait toute