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LA DOUBLE MAÎTRESSE

prière ou de travail, Trappes ou Chartreuses, l’épouvantèrent par la durée de leurs vœux. La perspective du cloître et de la discipline l’en éloigna non moins que la pensée de subir un supérieur. Quoique prêtre, il entendait rester libre ; serviteur de Dieu à la fois et des hommes lui paraissait être trop.

Le clergé séculier le reçut donc, mais il y serait mort de faim, n’y comptant ni protecteur ni patron. Il faut une figure pour confesser, pour prêcher ou pour instruire, et la sienne, bien qu’il fût ingénieux, éloquent et savant, eût fait rire. Les dévotes aiment l’absolution d’une belle main et la parole de Dieu ne les touche que par une bouche qui n’en grimace pas trop humainement les préceptes divins. Les éducations de grande maison lui étaient également interdites. On veut d’un précepteur à prestance. Les emplois domestiques et les aumôneries échoient à qui sait en remplir la fonction non seulement par son mérite, mais, aussi et déjà, par sa mine.

Restaient les bénéfices ; ils sont rares. L’abbé le savait, et l’évêque, M. de la Grangère, qui l’avait connu à Paris et s’intéressait à lui, l’en avertit. Ne pouvant lui en procurer un, le prélat lui offrit l’éducation provinciale et obscure du jeune Nicolas de Galandot. C’était le vivre, le couvert, des gages modestes, mais le temps d’attendre que quelque chose vaquât. Cela sauvait l’abbé des difficultés d’une vie que servaient mal à soutenir quelques messes au rabais qu’il fallait mendier à la porte des sacristies et quelques mauvais travaux de librairie qui rap-