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LA DOUBLE MAÎTRESSE

de mouchoir que le distrait laissait souvent sortir de sa poche semblait répondre à la grimace de l’enfant.

La promenade habituelle de Nicolas de Galandot le conduisait souvent au banc où Julie jouait une partie de l’après-midi. Ce banc était adossé à un treillage vert qui séparait l’allée d’un carré de grands arbres. L’enfoncement formait niche et quelques lattes du treillage, rompues à cet endroit, donnaient passage à l’enfant. Le lierre tapissait le sol du sous-bois de ses feuilles pressées en écailles d’un vert sombre ; il montait aux troncs en nervures musculeuses et velues. Le lieu était d’une fraîcheur noire qui plaisait à la petite.

Souvent elle se cachait dans l’épaisseur de cette retraite, lorsqu’elle entendait, de loin, sur le sable, le pas inégal de Nicolas. Elle remarquait qu’il ne manquait guère, en passant là, de l’y chercher des yeux ; puis il s’éloignait sans retourner la tête, d’ordinaire ; mais, une fois, ayant fait volte brusquement à un léger bruit, il aperçut, en dehors du treillage derrière lequel elle l’observait à l’abri, la figure mutine de Julie qui, rieuse et surprise en son divertissement favori, lui tirait irrévérencieusement une langue d’une aune.

Julie, méditant les suites de sa hardiesse, s’était rassise sur le banc, penaude et tranquille. Quelle que fût son habileté à prévenir les mouvements d’humeur de la tante Galandot, elle ne parvenait pas toujours à les tous éviter. Elle connaissait les verges.

C’était toute une cérémonie et les trois fois où