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chapitre xxx

monſtrerez bon exemple, viurez pudicquement, chaſtement, vertueuſement en voſtre meſnaige, comme voulez qu’elle de ſon couſté viue. Car comme le mirouoir[1] eſt dict bon & perfaict, non celluy qui plus eſt orné de dorures & pierreries, mais celluy qui véritablement repræſente les formes obiectes : auſſi celle femme n’eſt la plus à eſtimer, laquelle ſeroit riche, belle, elegante, extraicte de noble race : mais celle qui plus s’efforce auecques Dieu ſoy former en bonne grace, & conformer aux meurs de ſon mary. Voyez comment la Lune ne prent lumiere ne de Mercure, ne de Iuppiter, ne de Mars, ne d’aultre planette ou eſtoille qui ſoyt on ciel. Elle n’en reçoit que du Soleil ſon mary, & de luy n’en reçoit poinct plus qu’il luy en donne par ſon infuſion & aſpectz. Ainſi ſerez vous à voſtre femme en patron & exemplaire de vertus & honeſteté. Et continuement implorerez la grace de Dieu à voſtre protection. Vous voulez doncques (diſt Panurge fillant les mouſtaches de ſa barbe) que i’eſpouſe la femme forte deſcripte par Salomon[2]. Elle eſt morte ſans poinct de faulte. Ie ne la veid oncques, que ie ſaiche, Dieu me le veuille pardonner. Grand mercy toutesfoys, mon pere. Mangez ce taillon de maſſepain. Il vous aydera à faire digeſtion : puys boirez vne couppe de Hippocras clairet : il eſt ſalubre & ſtomachal. Suyuons.


  1. Comme le mirouoir. Voyez Plutarque, Préceptes du mariage, 13.
  2. Deſcripte par Salomon. — Ecclésiastique, 26.