Page:Rabelais ou imitateur - Le Disciple de Pantagruel, éd. Lacroix 1875.djvu/16

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liberté de penser, dans le Prologue de l’Auteur, qui semble déclarer, sous une forme voilée et obscure, qu’il est résolu à marcher dans la voie de la Vérité, mais qu’il ne veut pas pourtant s’y engager en aveugle, avec l’obéissance passive d’un esclave crédule et imbécile. Voilà le sens que nous paraît présenter ce passage du Prologue : « Je me suis délibéré, dit-il, de composer ung petit traicté… contenant aucune vérité, laquelle je suis délibéré d’ensuyvir, mais non pas de si prés que je luy marche sur les talons, de sorte que je luy fasse rompre les courroyes et les brides de ses pantoufles, au moyen de quoy je soye contrainct de les luy refaire avec mes aguillettes, car je n’en ay pas trop. Toutesfoys, mon intention est de la suyvre ung petit à gauche, sans la perdre de veue, si d’adventure je ne tomboye en ung fossé en la suyvant et que je me rompisse une jambe… Mon intention est de ne point eslongner d’elle, pour chose que j’escripve, comme chacun pourra veoir à l’œil s’il n’est aveugle, pour ce que je suis et veulx estre son principal thresorier et la servir loyaulment, comme il appartient à ung bon loyal serviteur, sans rien prendre ny desrober du sien furtivement ny malicieusement : au moyen de quoy elle n’aura cause de se plaindre de moy, ny de moy faire constituer prisonnier. »

Ceci est une véritable profession de foi, déguisée il est vrai, mais très-facile à comprendre, si l’on se rappelle que les premiers écrits des Réformés en France étaient toujours allégoriques et enveloppés d’une prudente réserve. Par exemple, un de ces écrits, auquel Rabelais n’était peut-être pas étran-