Page:Rabelais ou imitateur - Le Disciple de Pantagruel, éd. Lacroix 1875.djvu/90

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ne sentent ny ne seufTrent point de mal, pour l’odeur, pour la force et pour la bonté dudict vin.

Et quand ilz sont mors, on les retire, et puis on les faict seicher au soleil, comme les merlus parez, ou comme la den ou le stocsy en Flandres ; et, après qu’ilz sont bien secz, on les faict brusler et mettre en cendre, laquelle on paistrit avec le blanc et glaire des œufz et du brouillamini, lesquelz on malaxe tout ensemble comme paste. Et quand tout cela est bien courroyé et paistry ensemble, l’on en mect de gros loppins dedans des moulies qui sont telz et semblables qui ont aultresfoys esté iceulx defuncts avant leur mort. Et lors qu’ilz sont bien imprimez et bien formez, pour leur inspirer vie, l’on a ung gros chalumeau et leur souffle l’on au cul, et, à force de souffler, on leur inspire vie ; et congnoist on que l’on a assez soufflé quand ilz siblent ou qu’ilz esternuent, et lors ilz se lèvent le cul devant, comme les vaches, afin qu’ilz soient plus heureux.

Et incontinent ilz s’en vont où bon leur semble, comme ilz faisoient au paravant qu’ils fussent mors.

Il y en eut qui nous dirent qu’ilz avoient esté plus de cent foys mors, et plus de cent foys ainsi jectez en moulle : par ce moyen ilz sont pardurables et esternelz, et n’ont que faire de femmes au pays, qui leur est ung grand bien : car ilz ne sont point tencez ny batuz quand ilz