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— D’ailleurs, je trouve cela très bon. »

Il posa sa main sur la main légère qui tenait les brides.

— N’y allons pas ! retournez ! je vous en prie !… dites, voulez-vous ? fit-il inquiet.

— Je comprends ! tu as peur de revoir ta Lilie de jadis ! »

Elle fouetta vivement le cheval.

— Au contraire, laisse-moi essayer de réparer ma faute. »

Ils atteignirent la ville. Renée fut obligée de redresser elle-même Bruno étourdi. Il serait allé au diable pour fuir ce qui lui rongeait l’âme. Ils descendirent devant un hôtel sans choisir, puis se séparèrent, devenus muets tous les deux.

La noce entrait sous le porche de l’église quand Mlle Fayor, lasse de l’attendre, allait sortir par une porte latérale. Elle recula et se mit à l’ombre des arceaux.

Amélie Névasson donnait le bras à son père, un gros homme soufflant comme un bœuf dans son gilet de piqué blanc. Il se retournait à toutes les minutes pour voir si beaucoup de monde suivait. La mariée n’avait aucune grâce. Mince, d’une fraîcheur fade, mais fort pudique sous ses voiles de tulle. Son cou un peu long était orné d’un collier de perles fines mélangées de boutons de fleurs d’oranger. Elle paraissait aussi contente qu’il est décent de le paraître. Le marié avait une mine de circonstance, gourmée, sournoise, avec des œillades à l’entourage. Madame Né-