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Les pics tombèrent comme par enchantement, et les paysans, flairant de loin la cave du château, se ruèrent, bien sûrs d’avance de l’inutilité de cette bravacherie. L’architecte haussa imperceptiblement les épaules, mais il connaissait le général Fayor qu’on avait surnommé le Sabreur dans tous les environs de Montpellier. Il se contenta de venir se mettre à côté de Bruno.

Mlle Renée pourra attendre longtemps sa salle de bains, murmura-t-il ; monsieur son père est positivement enragé ! »

Bruno hocha le front, mais garda son idée.

— Je ne voudrais pas être son secrétaire, insinua encore le jeune homme.

— Bah ! répondit Bruno, philosophiquement, il faut bien gagner sa vie ! »

Et comme il était le secrétaire, lui, il étendit les bras en croix prenant le ciel à témoin de sa parfaite indifférence.

Le général piaffait sur place.

— Allons, ferme ! Par la gauche, mes amis ! Non… par la droite !… Elle a bougé !… Elle bougera !… Hop ! du courage !… »

Rien ne remuait… c’était toujours ainsi quand il se mêlait de la besogne ; il employait tant de force que les effets disparaissaient dans la cause.

Alors, furieux, le général se mit à hurler.

— Qu’on appelle Jacques le jardinier, Mérence mon brosseur, qu’on fasse venir tous les fermiers, s’il le faut ! Du monde ! vite !… »