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— Ferme la fenêtre si tu t’enrhumes ! tempêta le général. Ah ! c’est ma fille qui donne le branle, c’est ma fille qui s’unit à mes ennemis !… On nettoiera la vaisselle plate, vous m’entendez, mademoiselle !… La creuse, la plate !… Celle qui tient des deux, s’il y en a !… Tout pour demain… Demain à six heures. Et les provisions ! Ah ! ce duc de Pluncey a fait des choses royales !… Moi, je ferai des choses républicaines !… Ah ! ce pantin prétend qu’on ne peut que sourire de mes invectives ! On verra bien ! Ah ! il donne des dîners tous les jours à l’Hôtel des couronnes !… Moi, j’aurai un hôtel ici… Table ouverte, mademoiselle, vous avez bien entendu ?

— Une auberge enfin, riposta Renée. Mais… qu’est-ce que ce duc de Pluncey ?…

— Un aventurier !… mademoiselle !… Et il a osé insulter votre père… Un aventurier qui, logeant je ne sais où, a fait irruption dans l’arrondissement, achète les votes, parle comme cinquante histrions. Bref, un misérable… un anglais !…

— On le dit très riche.

— C’est un voleur, alors…

— Mais, papa, pourquoi posez-vous votre candidature si subitement ?

— Mes affaires ne te regardent pas. Je veux améliorer le sort de tous les habitants de Gana-les-Écluses.

— Ah ! et c’est pour une centaine d’imbéciles que vous allez troubler votre vie tranquille ?