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— Eh bien ! Largess, je ne voudrais pas que mon père fût élu. »

Malgré son habitude des aventures, Largess eut un imperceptible mouvement des paupières qui indiquait sa stupeur.

— Oui, je ne le veux pas !

— Il suffit, Mademoiselle.

— J’ai des raisons personnelles pour vouloir empêcher sa réussite.

— Mademoiselle n’ignore pas que monsieur le duc a moins de chances que monsieur votre père. Le général est plus connu, ses propriétés sont mieux entretenues et ses paysans sont mieux disposés que les nôtres (Largess, voyant le chemin fait, n’hésitait pas à prendre sa petite part de responsabilités politiques). Monsieur le duc ne se dissimule pas nos désavantages.

— Tant pis ! J’espérais que la tranquillité de Tourtoiranne ne serait jamais troublée. Maintenant, jusqu’à mon retour à Paris, ce ne sera que réceptions, dîners, réunions. Vous comprenez, Largess, une jeune fille déteste ces choses-là. Ensuite, nous nous créons des ennemis… »

Elle s’arrêta, pensant qu’elle en avait dit assez pour éclairer le duc.

— Dois-je répéter ?…, interrogea Largess.

— Je vous autorise… ; si je n’écris pas, c’est que je ne puis trahir…, et, bien que je considère ces élections comme jeux d’enfants…

— Peste ! murmura Largess…, des jeux d’enfants !