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garda, éperdu, les deux témoins impassibles qui ne le pouvaient secourir et lui souriaient bêtement. « Étranglez-le ou étranglez moi ! » voulut-il supplier.

Il éprouva surtout le violent désir d’écraser sur place cette belle fille dont les prunelles lançaient du feu… Ensuite…

— Monsieur Fayor, répondit-il, très bas, croyez que l’amour seul a été capable d’une pareille infraction aux lois des convenances, j’aurais dû… je le sais… On ne réfléchit pas en présence de mademoiselle votre fille ! je me suis laissé emporter… c’est l’exacte vérité… je suis venu…

— Vous l’avez vue… et vous êtes vaincu… acheva Fayor, commençant à subir une impression toute nouvelle. Déjà sa moustache se distendait, l’assaut, en somme, était drôle… Il se tourna vers sa fille :

— Tu me feras mourir de chagrin, s’écria-t-il, et il ajouta, en levant les poings, pour l’acquit de sa conscience : — Messieurs !… a-t-on l’idée d’une semblable algarade au milieu d’une élection !

— J’espère, général, que cela doublera vos chances ! dit le maire qui ne put faire surgir qu’un mot malheureux d’une situation absolument inextricable pour son pauvre entendement.

— Oui, riposta le duc, frissonnant de rage, car, dès aujourd’hui, j’abandonne ma candidature et me désiste en faveur de tous les royalistes du royaume… du pays, veux-je dire ! »

Pour le coup, le général examina sa fille.