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vir du chemin le moins poudreux, c’est-à-dire des sentiers longeant les champs. En effet, elle l’aperçut qui marchait, très lente, sous les arbres en emportant l’enfant. Un âpre vent d’octobre lançait à poignées des feuilles sèches contre les réprouvées aux humbles robes noires. Renée abandonna la sienne au vent, ce tapage de drapeau secoué força la mère à se retourner. Sa pâleur était affreuse, la petite pleurait.

— Madame ! appela Renée d’une voix étrangement douce que le duc n’eut pas reconnue.

— Mon fils ? Vous savez où est mon fils ? s’écria Mme Maldas comme folle.

— Où est Nono ? ajouta la petite.

— Je l’ignore ; approchez vite !

La longue traîne de soie enveloppa le groupe, semblable à une aile ténébreuse, elles furent fouettées au visage par les cheveux échappés de la capeline.

— Prenez cela, madame, fit Renée d’un accent saccadé, prenez ! Il y a deux mille francs, dépensez-les pour retrouver votre fils, car il le faut, et fuyez bien loin, le plus loin possible. Que jamais, jamais on ne puisse vous découvrir. Il est innocent. Allez, et le jour où vous serez tous en sûreté, écrivez-moi ici, une fortune entière vous appartient. Retenez mes paroles. Qui sait si je n’irai pas vous rejoindre moi même !

La fière Renée emportée par un mouvement passionné saisit les mains plébéiennes de la mère de Nono qu’elle serra avec fougue.