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— Oui, duc, je le connais, répondit-elle, et vous allez le connaître… regardez-le ! »

Elle se toucha le sein de l’index.

— J’ai tué, avoua-t-elle doucement, moi, Renée Fayor, aujourd’hui duchesse de Pluncey. »

Le duc bondit, secoué par une effroyable horreur. Sa femme… avait tué…

Il saisit ses poignets qu’il broya dans ses doigts. Un rire convulsif s’empara de lui.

— Ah ! ah !…ah !… la duchesse de Plun…cey !… un assa…ssin !… un assa…ssin !… »

Et il la dévisageait attentivement.

— Ce doit être…, je l’aimais trop… c’était fatal !… je lui aurais pardonné, je crois, de se prostituer aux secrétaires de son père !… Misérable… oh ! la misérable ! »

Renée ne bougeait plus. Elle attendait la fin de cette crise pour s’expliquer.

— Voulez-vous m’écouter, Edmond, dit-elle froidement, j’ai tué un amant parce qu’il était mon amant, voilà tout. Et, pour la même raison… je vous ai épousé. Je ne me suis pas prostituée aux secrétaires de mon père. J’aime Bruno d’un amour si pur que je ne me suis pas donnée à lui. »

Alors, la duchesse sans changer d’intonation, grave, presque digne comme l’accusé qui se justifie, dévoila le crime, n’omettant aucun détail et racontant la simple histoire de Nono telle qu’elle était.

Quand elle eut fini, elle s’aperçut que son mari sanglotait. M. de Pluncey, en l’écoutant, avait franchi