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nono

Nono ne prononça plus un mot.

La faute était commise, il avait menti. En dépit de son innocence, il sentait ce mensonge le pousser vers un abîme inconnu.

Sa promesse à Renée lui avait porté malheur, mais aussi pourquoi lui avait-il désobéi la première fois ? On le fit remonter en voiture et il fut ramené à la prison de Montpellier.

La nouvelle de son arrestation était déjà parvenue à sa mère. La pauvre femme jeta aussitôt le grand châle noir de son deuil de veuve sur ses épaules, mit son bonnet de crêpe, puis se dirigea vers le greffe en prenant des rues détournées. Mme Maldas ne pleurait pas, elle présenta sa permission au concierge sans faire aucune réflexion désolante.

Est-ce une permission permanente ? demanda celui qui tenait le registre d’écrou.

— Non, répondit-elle, car je pense qu’il sera en liberté demain. »

Cependant, elle doutait, la pauvre mère, elle savait bien qu’on n’est pas aimé impunément d’une duchesse quand on est le fils d’un jardinier.

Elle trouva Nono assis devant une fenêtre grillée. Il n’avait pas touché à son déjeuner, pourtant meilleur que le brouet du collège de Lodève, mais il n’avait plus faim. Il regardait le ciel, un ciel gris, terne, sanglotant par rafale dans un vent froid.

— Fils ! » dit la mère doucement. Alors il tourna la tête et tendant les bras eut une exclamation patoise comme il en avait jadis dans ses réveils de gamin.