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nono

— Ah ! qu’il était long, ce procès d’un innocent ! Il en deviendrait idiot, bien sûr ! » Machinalement, il porta à sa bouche un petit papier, presque un pétale de fleur sèche. Pour Nono, ce papier représentait l’espoir et, chaque fois qu’il s’endormait en le tenant sur ses lèvres, il avait remarqué qu’un rêve consolant le visitait durant sa nuit de prisonnier.

— Credo ! » murmura-t-il doucement. C’était son unique prière du matin. Il croyait.

Il n’aurait pas fallu lui demander en quel Dieu ; le Dieu de Nono était féminin !…

Tout à coup une exclamation déchirante retentit dans la cour, sous le grand porche. Les muscles de Bruno y répondirent par une vibration qui ébranla son corps entier. Il avait reconnu la voix de sa mère. D’un bond, il fut aux barreaux.

— Maman…, où es-tu ? Qu’est-ce que tu as ? Les exclamations devenaient plus faibles, elle s’éloignait ou on l’éloignait.

— Maman !… maman ! » répéta-t-il.

Personne ne répondit, la cour était déserte.

En face, un voleur, arrêté depuis peu, lui fit un petit signe. Il n’avait jamais parlé à ce voleur, lui ! Mais il se figura qu’on tuait sa mère là bas et il se mit à hurler.

— Je veux sortir !… Qu’on me fasse sortir… tout de suite ! »

Le voleur riait en multipliant ses signes.

— Ça te sera difficile, cria-t-il enfin, tu es au secret, animal ! »