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cerveau. Les sourcils se rapprochaient, ombrant ses yeux magnifiques. Elle était terrifiante.

— Vous refusez la réparation que je vous offre ?

— Un mariage ? je ne peux pas épouser un homme que je méprise et que tout mon entourage mépriserait. Mon père accepterait peut-être, pour l’honneur…, moi, pour l’honneur, je refuse.

— Vous n’en aurez pas moins eu un amant, Mademoiselle Fayor, et il ne vous restera qu’à le faire tuer par ce même père qui lui aurait accordé votre main, n’est-ce pas ? »

Renée examina le visage moqueur de son adversaire.

— Si vous dites cela, Victorien, c’est que j’ai mal fait de ne pas compter mes lettres.

— Vous êtes très forte, Renée… »

Il y eut un nouveau silence. Mlle Fayor tremblait de rage impuissante.

— Voyons, dit-elle, anxieuse, que vous faut-il ?

Est-ce un chantage ? De l’argent ? J’ai, chez moi des bijoux que personne ne peut me réclamer, j’ai des revenus indépendants, j’aurai plus encore de mon père sans avoir à l’informer de rien. Que voulez-vous… pour ?…

— La lettre que je dois avoir gardée ?

— Non, Victorien ; pour que je sois assurée de ne plus vous revoir.

— Vous me haïssez donc bien ?

— Autant que j’aurais aimé la vie si j’étais restée pure.