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nono

Est-ce qu’on peut plaire…, bâti comme je le suis ?

La petite sœur regardait ce chagrin. Elle aimait tout de même son nigaud de frère. Elle se dressa :

— Faut pas pleurer ! dit-elle très sérieusement. T’en trouveras une autre ! »

Est-ce qu’on ne remplaçait pas ses poupées, à elle ? Puis, tentée par le beau jardin, elle fila d’un air espiègle !

— N’abîme rien ! cria la mère, très inquiète. » Ils continuèrent à causer entre deux sanglots. La mère lui tapait sur les épaules, l’exhortant à la patience, mais on ne parla pas du tout du fil de perles.

Il faisait un chaud soleil. Renée était allée s’étendre sur son canapé dans la salle de bain. La jeune fille regardait avec une stupeur morne s’agiter une ombre le long des vitraux qui donnaient sur le rocher. Cette ombre prenait des proportions géantes, allait, venait, avait une grosse tête, des petits bras maigres, et des ballonnements confus. Le cristal dépoli d’un violet intense ne laissait pas deviner le reste. Enfin, Renée, dominée par une idée fixe, s’élança hors de la salle. Là, elle se trouva en présence de Césarine grimpée sur le point culminant du terre-plein, et essayant de monter sur la roche.

D’un bond terrible, Renée se jeta près d’elle.

— Petite malheureuse ! » s’exclama-t-elle, haletante, affolée, la suppliant du regard.

Césarine se tourna vers la dame. Elle était moins timide que son frère.

— Je fais donc du mal ? demanda-t-elle, étonnée.