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CHAPITRE III



Bruno Maldas conduisait le panier de Mlle Fayor. Ce n’était pas Mélibar qu’on attelait à ce panier, et Bruno ne haïssait que Mélibar. La route leur paraissait très longue. Renée ne disait rien ; de temps en temps, aux montées et aux descentes, elle se penchait pour examiner le paysage, en réalité pour avoir l’occasion de détourner la tête. Il se trouvait tout près d’elle, assis sur le haut coussin du cocher, et elle se sentait dominée par ses yeux bruns, lumineux, d’une inexplicable douceur. Déjà elle avait essayé de se reculer ; puis, elle était retombée dans une torpeur délicieuse, ne sachant plus où elle allait, ne voulant pas le savoir. Elle portait une sévère toilette de dentelles avec un corsage de satin ; on eût cru son buste taillé dans un marbre dont les sombres contours se mouillaient de reflets luisants. Sous son ombrelle noire doublée de rouge, elle avait une petite toque de