Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/142

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l’autre barque faisoient entendre une mélodie charmante ; le comte, assis près d’Emilie, n’étoit occupé que d’elle, et lui prodiguoit d’une belle voix, mais passionnée, des complimens dont le sens n’étoit pas douteux ; pour les éviter elle entretenoit la Signora Livona, et prenoit avec le comte une réserve imposante, mais trop douce pour contenir ses empressemens. Il ne pouvoit voir, entendre qu’Emilie, il ne pouvoit parler qu’à elle. Cavigni l’observoit avec humeur, Emilie avec embarras : elle ne desiroit rien tant que de retourner à Venise.

Ils prirent terre à la place Saint-Marc ; la beauté de la nuit détermina madame Montoni à agréer les propositions du comte, de parcourir la promenade avant que d’aller souper à son casin avec le reste de la société. Si quelque chose avoit pu dissiper les tourmens d’Emilie, c’étoit la nouveauté de tout ce qui l’entouroit, les ornemens des palais et le tumulte des mascarades.

Enfin ils se rendirent au casin ; il étoit orné dans le meilleur goût, un souper splendide y étoit préparé : mais ici la réserve d’Emilie fit comprendre au comte combien la faveur de madame Montoni lui étoit nécessaire : la condescendance qu’elle