Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/241

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Montoni et de trahir sa propre foiblesse, elle lutta contre les illusions de la crainte, et congédia Annette pour toute la nuit.

Quand elle fut seule, ses pensées se reportèrent sur l’étrange histoire de la signora Laurentini, et ensuite sur la situation où elle se trouvoit elle-même dans ce terrible château, au milieu des déserts et des montagnes, en pays étranger, sous la domination d’un homme que, peu de mois auparavant, elle ne connoissoit pas, dont elle avoit déjà ressenti un cruel abus d’autorité, et dont elle considéroit le caractère avec un degré d’horreur que justifioit la crainte générale qu’il inspiroit. Elle savoit qu’il avoit un courage égal à son génie et à ses talens pour l’exécution de ses projets. Elle craignoit bien qu’il n’eût le cœur trop vide de sentimens pour qu’aucune considération dérangeât les calculs de son intérêt. Elle observoit depuis long-temps le malheur de madame Montoni ; elle avoit souvent été témoin de la conduite sèche et méprisante de son époux envers elle. À tant de circonstances, qui lui causoient de si justes alarmes, se joignoient maintenant mille terreurs sans nom, qu’une ardente imagination peut seule faire naître, et qui défient la raison et la réflexion.