Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T3.djvu/99

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comte, il avoit commandé à tous ses gens d’être prêts au premier signal. En se pressant de gagner Udolphe, il vouloit soustraire Emilie à toutes les recherches de Morano, et rompre cette affaire sans s’exposer à aucune altercation. Si le comte, au contraire, n’avoit, comme il les appeloit, que des prétentions honorables, il suivroit sans doute, Emilie, et signeroit l’écrit projeté. Avec cette condition, l’intérêt de Montoni pour elle étoit si nul, qu’il l’auroit sacrifiée sans scrupule aux desirs d’un homme ruiné, dans l’unique vue de s’enrichir lui-même. Il s’abstint néanmoins de lui dire un seul mot sur les motifs de son départ, dans la crainte qu’une autre fois un rayon d’espérance ne la rendît moins traitable.

C’est par ces considérations qu’il avoit soudain quitté Venise ; et par des considérations opposées, Morano l’avoit poursuivi à travers les précipices de l’Apennin. Quand on annonça son arrivée, Montoni, ne doutant pas qu’il ne vînt accompagner sa promesse, se hâta de le recevoir ; mais la rage, les expressions, le maintien de Morano lorsqu’il entra, le détrompèrent au moment même. Montoni expliqua en partie les raisons de son brusque départ, et le comte persistant à demander Emilie, accabla Mon-