Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/35

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comte n’apprit sa mort qu’en recevant le testament qui lui donnoit Blangy. Ce ne fut que l’année suivante qu’il se détermina à le visiter, et à y passer tout l’automne. Il se rappeloit souvent Blangy avec les vives couleurs que prête l’imagination au souvenir des plaisirs de la jeunesse. Dans ses premières années il avoit connu la marquise ; il avoit visité ce séjour dans l’âge où les impressions des plaisirs demeurent sur-tout sensibles. L’intervalle qui s’étoit depuis écoulé dans les secousses et le tumulte des affaires, qui trop souvent corrompent le cœur et gâtent le goût, n’avoit point effacé de sa mémoire les ombrages du Languedoc, et jamais ce souvenir ne l’avoit trouvé indifférent.

Pendant plusieurs années, le feu marquis avoit abandonné le château. Le vieux concierge et sa femme l’avoient laissé dégrader à l’excès. Le comte prit le parti d’y passer un automne pour veiller aux réparations. Les prières, les larmes même de la comtesse qui, au besoin, savoit pleurer, n’avoient pas eu le pouvoir de changer sa résolution. Elle se prépara donc à souffrir ce qu’elle ne pouvoit empêcher, et à s’absenter de Paris. Sa beauté y réunissoit les suffrages, mais son esprit y avoit peu de droits.