Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/45

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vingt ans que, mon mari et moi, nous sommes à son service. La maison est si grande, elle étoit si déserte, que nous nous y croyions perdus. Au bout de quelque temps, nous allâmes vivre au bord des bois, dans le voisinage de quelques habitans. Nous venions seulement surveiller le château de temps à autre. Quand mon maître eut fini ses campagnes, il avoit pris ce château en aversion ; il n’y revint plus, et il trouva bon que nous ne quittassions pas la chaumière. Hélas ! hélas ! combien ce château est changé de ce qu’il étoit autrefois ! Quel plaisir ma maîtresse y prenoit ! Je me ressouviendrai toujours du temps qu’elle vint ici tout nouvellement mariée ! Qu’elle étoit belle ! Mais, depuis ce temps-là, on a tant négligé ce château ! il est tellement tombé en ruines ! Je ne verrai plus de pareils jours !

La comtesse parut presque offensée des regrets naïfs de la bonne femme sur les temps passés. Dorothée ajouta : Mais le château va être encore habité et vivant ; le monde entier ne m’y feroit pas demeurer toute seule.

On n’en fera pas l’expérience, à ce que je crois, dit la comtesse. Elle étoit contrariée que son silence constant n’eût pas contenu