Page:Raoul - Trois satiriques latins, vol 1 Juvénal, 1842.djvu/149

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C’est là qu’à s’escrimer, l’une et l’autre s’apprête.
Au pied de l’autel même à la hâte on descend :
Et, comme d’un syphon, tout à coup jaillissant,
Un double filet d’eau, prompt effet de l’ivresse,
Inonde la statue et souille la déesse.
Alors on se défie, on s’étreint tour à tour,
Et Diane est témoin de cet horrible amour.
Chacune rentre ensuite, et, d’une audace égale,
Regagne effrontément la maison conjugale.
Et toi qui, devançant le lever du soleil,
Cours de tes protecteurs saluer le réveil,
Tu foules en chemin, sur la pierre glissante,
De ces obscénités la trace encor récente.

De la bonne déesse on connaît les secrets ;
On connaît de l’airain les rapides effets,
Lorsqu’aux accents du cor, des femmes éhontées,
Par les sons et le vin tout à coup transportées,
En tourbillons épars, avec des cris affreux,
Ménades de Priape, agitent leurs cheveux.
Quels désirai quels élans ! quels immondes vestiges,
Sur le parquet sali, trahissent leurs vertiges !
Des plus viles Phrynés provoquant les transports,
L’ardente Sauféia les saisit corps à corps ;
Elle emporte le prix, puis, devant Médulline,
En extase à son tour elle tombe et s’incline.
Entre elles la vigueur, en ce choc glorieux,
Égale la victoire à l’éclat des aïeux.
Ce n’est plus de l’amour une vaine peinture ;
Elles savent si bien imiter la nature,
Qu’elles enflammeraient et l’infirme Nestor,
Et les sens engourdis du vieux père d’Hector.
Mais l’ardeur est au comble, et ne peut plus attendre.
De tous les coins de l’antre, un cri se fait entendre ;
Un cri de rage : Ouvrez, Cybèle l’a permis ;
Ouvrez, et qu’à nos yeux les hommes soient admis.