Page:Rapport final sur les droits de l'homme et l'extrême pauvreté, présenté par le Rapporteur spécial, M. Leandro Despouy.djvu/38

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international relatif aux droits civils et politiques qui prévoit aussi le droit de chacun de voter et d'être élu, et d'accéder aux fonctions publiques de son pays.

167. On a déjà vu que l'errance et la non-inscription sur les registres d'état civil constituent des obstacles majeurs à l'exercice de ce droit. L'analphabétisme, un faible niveau d'instruction, ou même la discrimination sociale constituent aussi des difficultés majeures pour un exercice responsable des droits politiques. "Quand je me suis présenté au bureau de vote pour me faire inscrire on m'a dit : 'non, vous sortez de prison, vous n'avez pas le droit de voter'. En réalité, ils s'étaient trompés, c'est mon père qui avait fait de la prison. Quand je suis allé à la gendarmerie pour faire rectifier, ils m'ont répondu : 'les défauts de l'un, c'est les défauts de l'autre', et ils n'ont rien fait pour que je puisse voter."

168. Les rapports d'observation électorale montrent que les personnes très pauvres sont plus exposées que d'autres aux manipulations peu scrupuleuses de la liberté de choix, fondement de la démocratie représentative.

169. D'un point de vue prospectif, dans ce domaine comme dans d'autres, le développement de la société de l'information, qui permettra, par exemple d'organiser une consultation des citoyens par l'électronique, est susceptible de générer de nouvelles exclusions parmi les populations les plus pauvres et les moins instruites (Voir à ce sujet, "Bâtir une société européenne de l'information pour tous", Premières réflexions du Groupe d'experts de haut niveau, Commission européenne, Bruxelles, janvier 1996, p. 88 et suiv.).

12. Le droit de participer à la vie sociale et culturelle

170. L'article 22 de la Déclaration universelle établit que "toute personne ... est fondée à obtenir la satisfaction des droits sociaux et culturels indispensables à sa dignité". L'article 15 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels établit de même le droit de chacun de participer à la vie culturelle.

171. Pourtant les personnes vivant dans l'extrême pauvreté sont parfois refoulées des lieux culturels. Ainsi en témoigne une personne engagée auprès de familles très pauvres : "J'avais prévu d'emmener un groupe d'enfants du quartier au zoo. C'était une fête pour les enfants, mais lorsque nous sommes arrivés, on nous a refusé l'entrée, à cause de 'l'aspect des enfants'." Face à de tels affronts, les personnes en situation d'extrême pauvreté hésitent à participer à la vie sociale et culturelle, même à des fêtes locales (cf. par. 119 du présent chapitre).

172. La culture n'est donc pas un "en plus" que l'on apporterait une fois tous les autres droits assurés. "La culture, c'est avoir des connaissances qui permettent d'être autonomes, de se diriger dans la vie et de pouvoir réfléchir", disent des participants d'une université populaire; "c'est aussi ce qui nous relie aux autres, ce qu'on peut apporter aux autres, ce que nous apprenons les uns des autres et qui permet de nous respecter".

173. Rétablir le droit à la culture dans les zones de grande pauvreté est donc une dimension essentielle de la lutte contre la misère. Prend ici tout son sens le plaidoyer permanent de l'UNESCO pour la "dimension culturelle du développement" (Voir à ce sujet les nombreux travaux de l'UNESCO, dans le cadre de la Décennie mondiale du développement culturel, ainsi que le Rapport de la Commission mondiale sur la culture et le développement de l'UNESCO, "Our creative diversity", commission présidée par M. J. Pérez de Cuéllar, 1996.). L'action culturelle permet de développer avec les très