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des deux Indes.
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de ſpectacle ; on n’y joue point ; on n’y fait que très-rarement des viſites ; on y parle peu. Les plaiſirs des femmes ſe bornent à rendre heureux leurs époux, leurs enfans, leurs ſerviteurs, leurs eſclaves même.

Tandis qu’elles ſe livrent à ces ſoins touchans, les hommes s’occupent tout entiers des affaires extérieures. Sur le ſoit, lorſque les vents ſont tombés, chaque famille réunie, va jouir de l’exercice de la promenade, de la douceur de l’air. La vie d’un jour eſt celle de toute l’année ; & l’on ne s’aperçoit pas que cette uniformité nuiſe au bonheur.

Un trait à remarquer dans les mœurs de cette colonie, c’eſt qu’on y retrouve l’uſage le plus précieux de la candeur des premiers âges. Une jeune perſonne devient-elle ſenſible, un aveu naïf ſuit de près cette impreſſion délicieuſe. L’amour, dit-elle, eſt une paſſion naturelle qui doit faire le charme de ſa vie & la dédommager du danger d’être mère. Celui qui a eu le bonheur de lui plaire eſt auſſi-tôt chéri publiquement, s’il éprouve le goût qu’il inſpire. Dans des liens libres & ſacrés, que l’ambition, l’avarice & la vanité n’ont point formés, la confiance ſe