Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/16

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taureau. Le ſang de l’homme arroſa le tertre ſacré.

Cependant on voyoit ſouvent l’homme de bien dans la ſouffrance, le méchant, l’impie même dans la proſpérité, & l’on imagina la doctrine de l’immortalité. Les âmes affranchies du corps, ou circulèrent dans les différens êtres de la nature, ou s’en allèrent dans un autre monde recevoir la récompenſe de leurs vertus, le châtiment de leurs crimes. Mais l’homme en devint-il meilleur ? c’eſt un problême. Ce qui eſt sûr, c’eſt que depuis l’inſtant de ſa naiſſance juſqu’au moment de ſa mort, il fut tourmenté par la crainte des puiſſances inviſibles, & réduit à une condition beaucoup plus fâcheuſe que celle dont il avoit joui.

La plupart des légiſlateurs ſe ſont ſervis de cette diſpoſition des eſprits pour conduire les peuples, & plus encore pour les aſſervir. Quelques-uns ont fait deſcendre du ciel le droit de commander ; & c’eſt ainſi que s’eſt établie la théocratie ou le deſpotiſme ſacré, la plus cruelle & la plus immorale des légiſlations : celle où l’homme orgueilleux, malfaiſant, intéreſſé, vicieux avec impunité,