Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/350

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de jouir. Les exercices mâles & robuſtes qui diſciplinoient la jeuneſſe & la préparoient aux profeſſions graves & périlleuſes, font place à l’amour des ſpectacles, où l’on prend toutes les paſſions qui peuvent efféminer un peuple, quand on n’y voit pas un certain eſprit de patriotiſme. L’oiſiveté gagne dans les conditions aisées ; le travail diminue dans les claſſes occupées. L’accroiſſement des arts multiplie les modes ; les modes augmentent les dépenſes ; le luxe devient un beſoin ; le ſuperflu prend la place du néceſſaire ; on s’habille mieux, on vit moins bien ; l’habit ſe fait aux dépens du corps. L’homme du peuple connoît la débauche avant l’amour, & ſe mariant plus tard, a moins d’enfans, ou des enfans plus foibles : le bourgeois cherche une fortune avant une femme, & perd d’avance l’une & l’autre dans le libertinage. Les gens riches, mariés ou non, vont ſans ceſſe corrompant les femmes de tout état, ou débauchant les filles pauvres. La difficulté de ſoutenir les dépenſes du mariage, & la facilité d’en trouver les plaiſirs, ſans en avoir les peines, multiplient les célibataires dans toutes les claſſes.