Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/443

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dans le ſang des nations. L’ignorance ſeule triomphoit ſous l’étendard de la croix ou du croiſſant. Devant ces ſignes redoutés, tout genou fléchiſſoit, & tout eſprit trembloit.

La philoſophie balbutioit dans une enfance continuelle les noms de Dieu & de l’âme. Elle s’occupoit des ſeules choſes qu’elle devoit toujours ignorer. Elle perdoit le tems, la raiſon & tous ſes travaux dans des queſtions du-moins oiſeuſes, la plupart vuides de ſens, indéfiniſſables, interminables par la nature de leur objet, ſource éternelle de diſputes, de ſciſſions, de ſectes, de haines, de persécutions, de guerres nationales ou religieuſes.

Cependant, les Arabes conquérans menoient, comme en triomphe, les dépouilles du génie & de la philoſophie. Ariſtote s’étoit entre leurs mains, ſauvé des ruines de l’ancienne Grèce. Ces deſtructeurs des empires avoient quelques ſciences, dont ils étoient les créateurs. Le calcul étoit de leur invention. L’aſtronomie & la géométrie alloient avec eux ſur les côtes de l’Afrique, qu’ils dévaſtoient & repeuploient. La médecine les