Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/210

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droit ſacré & impreſcriptible de la propriété. Dans un monaſtère, tout eſt à tous ; rien n’eſt individuellement à perſonne ; les biens forment une propriété commune. C’eſt un ſeul animal à vingt, trente, quarante, mille, dix mille têtes. Il n’en eſt pas ainſi d’une ſociété. Ici, chacun a ſa tête & ſa propriété ; une portion de la richeſſe générale, dont il eſt le maître & maître abſolu, dont il peut uſer ou même abuſer à ſa diſcrétion. Il faut qu’un particulier puiſſe laiſſer ſa terre en friche, ſi cela lui convient, ſans que l’adminiſtration s’en mêle. Si le gouvernement ſe conſtitue juge de l’abus, il ne tardera pas à ſe conſtituer juge de l’us ; & toute véritable notion de propriété & de liberté ſera détruite. S’il peut exiger que j’emploie ma choſe à ſa fantaiſie ; s’il inflige des peines à la contravention, à la négligence, à la folie, & cela ſous prétexte de la notion d’utilité générale & publique, je ne ſuis plus le maître abſolu de ma choſe ; je n’en ſuis que l’adminiſtrateur au gré d’un autre. Il faut abandonner à l’homme en ſociété, la liberté d’être un mauvais citoyen en ce point ; parce qu’il ne tardera pas à en