Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/303

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produit tant de maux, une haîne qu’il portait juſqu’à la frénéſie. On raconte à ce ſujet, qu’étant au collège, & jouant dans une pièce le rôle d’un François qui avoit un démêlé avec un Eſpagnol, il ſe jeta ſur ſon interlocuteur avec tant de rage, qu’il l’auroit étranglé, ſi on ne le lui eût arraché des mains. Son imagination enflammée lui repréſentoit ſans ceſſe des peuples innombrables, égorgés par les monſtres ſortis de l’Eſpagne. Il ne reſpiroit que l’ardeur d’expier tant de ſang innocent. L’enthouſiaſme de l’humanité devint en lui une fureur plus cruelle encore que la ſoif de l’or ou le fanatiſme de religion qui avoient immolé tant de victimes. On eût dit que leurs mânes crioient vengeance au fond de ſon âme. Il entendit parler des frères de la côte, comme des ennemis les plus implacables du nom Eſpagnol ; & il s’embarqua pour les aller joindre.

On rencontra dans la route un vaiſſeau eſpagnol qui fut attaqué, & auſſi-tôt abordé : c’étoit l’uſage du tems. Montbars fondit le ſabre à la main ſur les ennemis, ſe fit jour au milieu d’eux, & ſe portant deux fois d’un