Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/184

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avoit de ſon génie. L’eſtime & l’attachement qu’il avoit inſpiré aux François de Saint-Domingue & de la Tortue, engagèrent le gouvernement à le charger d’en diriger, ou plutôt d’en établir la colonie.

L’exécution de ce projet étoit remplie de difficultés. Il s’agiſſoit d’élever l’ordre ſocial ſur les ruines d’une féroce anarchie ; de réduire le brigandage indépendant, ſous l’autorité ſainte & sévère des loix ; de reproduire le ſentiment de l’humanité dans des âmes endurcies par l’habitude du crime ; de ſubſtituer les inſtrumens innocens de l’agriculture aux armes deſtructives du meurtre ; de réſoudre à une vie laborieuſe des barbares accoutumés à l’oiſiveté, compagne des rapines ; d’inſpirer la patience à des hommes violens ; la préférence des fruits lents d’un travail opiniâtre, à des jouiſſances rapides, obtenues d’un coup de main ; le goût de la paix à la ſoif du ſang ; la crainte du péril à celui qui ſe plaiſoit à le chercher ; l’eſtime de la vie à celui qui la mépriſoit ; enfin le reſpect pour le privilège d’une compagnie excluſive formée en 1664 pour tous les établiſſemens François, à celui qui n’avoit jamais rien