Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/356

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innombrables. Bientôt ſon royaume ne fut plus qu’un camp ; ſes frontières ne furent plus qu’une haie de places fortes. Sous ce règne brillant, les reſſorts de l’état furent toujours trop tendus. On ne ſortoit d’une criſe que pour entrer dans une autre. À la fin, le déſordre ſe mit dans les finances ; & dans l’impoſſibilité de ſuffire à toutes les dépenſes, le ſacrifice des forces navales fut jugé, mal-à-propos peut-être, indiſpenſable.

Depuis la fin d’un ſiècle, où la nation ſoutenoit du moins ſes diſgrâces par le ſouvenir de ſes ſuccès, en impoſoit encore à l’Europe par quarante ans de gloire, chériſſoit un gouvernement qui l’avoit honorée, & bravoit des rivaux qu’elle avoit humiliés : depuis cette époque, la France a perdu beaucoup de ſa fierté, malgré les acquiſitions dont ſon territoire s’eſt agrandi. De longues paix ne l’auroient pas énervée, ſi l’on eût tourné vers la navigation des forces trop long-tems prodiguées à la guerre : mais ſa marine militaire n’a pris aucune conſiſtance. L’avarice d’un miniſtère, les prodigalités d’un autre, l’indolence de pluſieurs ; de fauſſes vues, de petits intérêts ; les intrigues d’une cour qui mènent