Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/380

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anéantiſſement dans lequel ils croupiſſent ou dont ils ſont menacés.

Au moment où s’eſt élevé, au centre d’une nation, le grand fantôme ſur lequel on ne porte ſes regards qu’en tremblant, les ſujets ſe partagent en deux claſſes. Les uns s’éloignent par crainte ; les autres s’approchent par ambition ; & ceux-ci ſe promettent la sécurité dans la conſcience de leur baſſeſſe. Ils forment entre le deſpote & le reſte de la nation, un ordre de tyrans ſubalternes, non moins ombrageux & plus cruels que leur maître. Ils n’ont à la bouche que ces mots : Le roi ; le roi l’a dit ; le roi le veut ; j’ai vu le roi ; j’ai ſoupé avec le roi ; c’eſt l’intention du roi. Ces mots ſont toujours écoutés avec étonnement, & finiſſent par être pris pour des ordres ſouverains. S’il reſte quelque énergie, c’eſt dans le militaire qui ſent toute ſon importance, & qui n’en devient que plus inſolent. Et le prêtre, quel rôle joue-t-il ? Favorisé, il achève d’abrutir les peuples par ſon exemple & par ſes diſcours. Négligé, il prend de l’humeur ; il devient factieux, & cherche un fanatique qui ſe dévoue. Partout où il n’y a ni loix fixes, ni juſtice, ni